Je volais. Je m'envolais plutôt. J'avais l'impression de courir après le temps, de fuir toutes ces responsabilités qui m'enfermaient dans une cage. Une cage bien solidifié, rembarrée par toutes ces personnes qui m'empêchaient de vivre. Qui m'empêchaient de vivre mon rêve, celui de le retrouver. Celui de le revoir. Celui de reprendre contact. Mais c'était trop tard, et j'avais du mal à m'y faire. C'était même impensable. La mort ne pouvait pas séparer l'amour, si ? D'après mes expériences c'étaient fort possible. C'était même tout à fait faisable. C'était probable. C'était sûr. Je ne me faisais pas à cette idée, à ce drame, à toute cette tragédie. C'était tellement difficile de se séparer de ceux que l'on aime. Ceux à qui l'on tient plus que tout. C'était tellement dur. C'étaient les sentiments qui ne pouvaient s'envoler en un coup de vent qui compliquaient le tout, qui nous foutaient en l'air, qui nous poussaient à le faire. C'était l'amour qui avait toujours tout foutu en l'air, qui avait toujours tout gâché, qui nous avait toujours bien bousillé. C'était l'amour qui nous avait usé, celle qui nous avait achevé. C'était aussi celle qui nous avait trahi, celle qui nous avait menti, mais surtout, celle qui était parti sans se retourner, sans prendre la peine de nous regarder. C'est celle qui nous aveuglait, celle qui nous enfermait, celle qui nous emprisonnait. Mais après tout qu'est-ce ça valait la peine de souffrir pour une personne ? Une personne que l'on aimait, certes, mais une personne quand-même. Une personne qui voulait note bonheur mais qui faisait tout notre malheur. Elle avait le pouvoir de nous détruire rien qu'avec une parole. Mais avec la confiance, on apprenait à se dire que jamais elle ne nous ferait un telle chose, jamais son but ne serait de nous anéantir, jamais elle ne s'amuserait à nous nuire, encore moins à nous détruire. Jamais elle n'oserait faire un tel coup. Et puis même si elle essayait, elle n'irait jamais jusqu'au bout. Jamais elle n'y parviendrait, jamais elle n'y arriverait. 

J'errais dans de vastes plateaux. Je courais après le soleil couchant. Jamais je ne l'attraperais mais je préférais tenter, ce qui permettait aussi de me défouler. J'avais l'impression que jamais je n'allais m'arrêter, que je pourrais à jamais continuer, sans cesser de courir, sans ne jamais stopper de fuir. C'était incroyable. C'était l'espoir. C'était vivable. C'était trop tard. Plus jamais je ne trouverais d'échappatoire. J'étais condamnée ici. Condamnée à souffrir pour le restant de mon existence, pour le restant de ma vie. Pour l'éternité certainement, si le Clan des Étoile n'achevait pas mes souffrances, si au contraire il les aggravait, si encore plus il les amplifiaient. J'étais complètement. J'avais besoin de péter un câble. J'avais besoin de me défouler. J'avais besoin de courir, j'avais simplement besoin de m'évader, besoin de vivre un bon coup, besoin d'effacer tout ce passé qui m'empêchait d'avancer, celui qui ne faisait que me bloquer, celui qui ne faisait que me stopper, et ça sûrement pour l'éternité si je me tardait d'agir, si je tardais à l'achever. Justement. Quelque chose m'avait stoppé. Une présence inconnue. Une femelle gisait devant moi. Je m'arrêtais net. « - Bonsoir. Qu’est ce qui vous amène par ici ? Le magnifique couché de soleil ? » avais-je une tête à rire ? Je sentais les larmes couler, celle qui m'avait permis tant de fois d'oublier, de plonger dans ma peine pour pouvoir ensuite mieux l'effacer, la pousser à s'en aller. Je dévisageais la personne qui se trouvait en face de moi. Elle provenait du Clan des Herbes et à son air sérieux elle occupait un poste important au sein du Clan. « Certainement pas. Je suis Étoile du Présage, meneuse du Clan des Océans. On se rencontres dans de biens mauvaises circonstances j'ai envie de dire. Ce n'est pas vraiment ma période. »

La femelle me regardait. Elle venait du Clan des Herbes, c'était clair. J'étais sur leur territoire à présent. Tant pis. J'assumais parfaitement le fait que je sois en terres ennemies. Certes, je prendrais mal le fait qu'un guerrier ennemi pénètre sur mes terres mais il s'agissait du Clan des Herbes là, le Clan le plus généreux et le plus pacifiste de tous les Clans de la forêt; et ça depuis la nuit des temps. Je détournais délicatement la tête pour observer le soleil couchant lorsqu'elle murmura ces paroles. « Pourtant, un couché de soleil apaise les esprits. Même si on n’oublie pas la peine ou la colère, on peut se détendre pendant quelques instants. » Sa voix était douce et gentille. On avait l'impression de vivre dans un paradis avec elle. On avait le sentiment que tout allait toujours bien se dérouler, que tout allait toujours être bon, gentil et joyeux. On voyait qu'elle rendait le monde heureux. Malheureusement ce n'était pas réellement le cas. Ce n'était pas vraiment possible un monde pareil. C'était un monde trop parfait, un monde trop pacifiste donc un monde ennuyeux que personne n'arriverait à supporter. Tout le monde ne ferais rien d'autre que de s'amuser tout le temps et c'était certain qu'au bout d'un moment, de nombreuses personnes craqueraient et finiraient par tomber profondément dans la dépression, ce qui ferait de ce monde parfait un monde vraiment imparfait. C'est pourquoi personne ne pourra jamais changer la mentalité des autres pour atteindre la perfection. D'ailleurs on ne pouvait jamais atteindre la perfection, parce que l'on veut toujours plus et toujours mieux, ce qui nous pousserait dans un but sans but réel. C'était tellement compliqué cette définition de perfection. Je crois bien que j'étais en train de m'embrouiller toute seule au fond. Finalement le monde était bien comme il l'était, qu'il soit parfait ou non. Je ne voyais pas vraiment pourquoi la femelle optimisait à ce point. Peut-être qu'elle était aveugle, comme tous les autres, qu'elle ne voyait pas que le monde n'était pas tout rose mais bien au contraire, qu'il était noir et sombre, qu'il ne vous apportait rien de soulageant si ce n'est la mort. D'ailleurs la mort, c'est ce qui nous aidait, c'est aussi ce qui nous poussait à vivre au jour le jour comme on dit si bien. La mort, c'est celle qui vous retire tout sans que vous n'ayez le temps de dire la moindre chose. Peut-être qu'elle se comportait ainsi parce qu'elle était fausse, comme tous les autres. Peut-être que c'était parce qu'elle provenait du Clan des Herbes et qu'elle était tolérante et généreuse. Je ne savais pas vraiment pourquoi est-ce qu'elle persistait à voir le monde tout rose ainsi. « Je suis Etoile du Requiem, meneuse du Clan des Herbes. Je pense que tu avais pu le sentir mais je préfère me présenter convenablement. » Ah. C'était donc une meneuse. La meneuse du Clan des Herbes. Étoile du Dragon avait-il donc chuté ? Qu'était-il arrivé au pauvre meneur ? Il avait perdu sa compagne il y a des années de cela et ne s'en était vraiment pas remit. Il avait dû ne pas supporter une telle pression. De toute façon si l'on regarde bien il n'y a que le Clan des Nuages qui tient réellement le coup. Dans le Clan des Marais, Étoile Encrée avait sombré, suivie d'Étoile de la Salamandre. Ou peut-être que c'était l'inverse je ne sais plus. En tout cas cela faisait deux meneuse pour le Clan des Marais et cela en même pas une seule lune complète ! Pour le Clan des Herbes, Étoile du Dragon avait certainement sombré étant donné que j'avais devant moi la nouvelle dirigeante du Clan des Herbes. Pour le Clan des Éclairs, Étoile du Vent avait cédé sa place d'après une rumeur qui circulait un peu partout dans la forêt et que l'un de mes guerriers m'avait rapporté. Pour ce qui est du Clan des Océans, nous tenions toujours le coup puisque je m'efforçais à ne pas tomber gravement dans la dépression au risque de nuire à mon Clan. Je ne voulais pas le conduire droit à la perte et encore moins perdre par fierté. Je ne voulais en aucun cas me faire déshonoré. Surtout qu'à présent c'était terminé, qu'il fallait que je me trouve un nouveau présent pour pouvoir construire le futur, même si ce n'est pas celui dont j'avais rêvé lorsqu'il était encore là. Je détournais à nouveau la tête mais cette fois auprès de la meneuse. « Qu'est-il arrivé à Étoile du Dragon ? » J'avais posé cette question sans toutefois vraiment me la poser intérieurement. J'en connaissais les réponses alors à quoi bon ? Je m'efforçais pourtant. Je me demandais quand-même comment s'y était prit le meneur pour s'effacer ainsi.. C'était une bien triste fin pour un tel chef. J'appréciais beaucoup le jeune mâle et sa perte me faisait quand-même quelque chose. Nous avions eu le même parcourt presque lui et moi. Sauf que moi contrairement à lui j'avais tenu le coup, même si cette culpabilité de n'avoir rien pu faire me ronge encore aujourd'hui, comme elle me rongeait autrefois. Je m'en veux tellement...

Étoile du Dragon. Je me souviens très bien de ce meneur courageux qui avait toujours réussi à se relever malgré toutes les choses qui avaient pu le faire chuter, et ça de nombreuses fois. Je me souviens d'un chef très aguerrit qui continuait à se battre au péril de sa vie. Je me souviens d'un chat agréable et toujours très gentil. Ce chef était tellement bon et juste, il voulait toujours le bonheur des autres, ce qu'i l'avait rendu quelque peu pacifique. Il n'avait jamais vraiment aimé la guerre, les batailles, ni se battre d'ailleurs. Je crois même qu'il avait horreur de la violence et qu'il trouvait ça injuste. Pourtant, c'était la principale solution qui réglait tout nos conflits. Les chefs avaient beau parler et encore parler pour essayer de trouver un accord, une entende, une négociation; les batailles avaient toujours prit le dessus et la haine n'avait fait que les attiser encore plus. Rien n'avait été encore réglé par les paroles et le raisonnement. Pour preuve, le Clan des Étoiles lui-même avait été forcé de tuer tous les anciens guerrier de la forêt de Cerfblanc pour avoir enfin la paix dans la nouvelle forêt, afin de prendre enfin un nouveau départ. Il ne fallait pas vraiment s'étonner si après tous les guerriers avaient prit en tête comme raisonnement que la violence réglait tous les conflits, que la force était maître et que l'intelligence et la réflexion n'étaient bonnes que pour les faibles et les lâches. « Il est mort. » Elle avait dit ça d'une voix froide et sans réelle expression du visage. Elle était restée un peu neutre, ce qui m'avait surpris. En même temps, personne n'avait réellement apprécié la mort d'une personne, surtout lorsqu'elle nous était chère. C'était tellement dure à digérer, tellement compliqué à avaler, cette disparition qui n'était vraiment pas temporaire, au contraire. La mort, c'est un adieu définitif. Il n'y a pas de retour en arrière, non, c'est vraiment une chose très impossible. C'est tellement dur de se dire que plus jamais on ne reverra la personne alors qu'on a même pas eu le temps de lui dire à quel point on l'aimait, surtout si l'on a jamais eu l'occasion de lui dire. la mort, c'est quelque chose qui nous prend en général quand nous n'en n'avons pas besoin, lorsque tout va mal et qu'elle ne fait qu'aggraver les choses, qu'elle n'st là que pour nous dire que nous valons pas le coup, que nous sommes tous des lâches. 

Étoile du Requiem était à présent distante. Elle n'osait plus dire grand chose. En même temps, qu'aurait-elle pu dire ? Si Étoile du Dragon lui manquait, elle n'avait certainement pas très envie d'en parler. Je savais parfaitement ce qu'elle pouvait ressentir, j'étais vraiment bien placée. J'avais perdu un amour, quelqu'un que j'avais toujours aimé. C'était compliqué. C'était vraiment dur à encaisser. « Tu le connaissais bien ? » Sa question me surprit quelque peu. Il faut dire que je ne m'y étais pas vraiment attendue à cette question. La femelle m'avait paru quelque peu rêveuse pendant quelques instants. Peut-être qu'elle avait eu des sentiments pour Étoile du Dragon elle aussi. « Oui, effectivement. C'était un très bon ami à moi. Nous avions grandit ensemble en quelques sortes. » Et c'était vrai. Il avait été mon meilleur ami pendant quelques temps. Il était tellement gentil... J'avais toujours été étonnée par son grand coeur et cette envie que le monde soit parfait et tout rose, que tout aille bien. Il ne se sentait pas supérieur, il trouvait que tout le monde était égal. Ses guerriers le traitaient comme un simple guerrier pour lui, cela avait toujours été très normal. J'étais vraiment déçue par sa mort, vraiment. Je sentais que quelque chose n'allait pas en moi. Je voyais que la femelle aussi n'allait pas bien. J'avais encore perdu quelqu'un qui m'étais cher et ce sentiment me revenait encore plus souvent et plus fort à présent qu'ils étaient deux. 

Que pouvons nous dire sur les sentiments qui nous envahissent tous en un instant ? Tout cet amour que l’on peut ressentir tandis que d’autres ne ressentent que de la haine. Comment pouvons nous combattre les préjugés qui submergent les ignorants. Ceux qui n’ont pas eus la chance de connaître et de se faire une propre opinion. On ne peut les blâmer, mais on ne peut innocenter ce jugement trop rapide de ceux qui nous ont aimé, protégé, quelques fois, élevés. Ce meneur, Etoile du Dragon, a été jugé comme bien d’autres, mais je l’admirais pour sa vie simple. Aucune prise de tête inutile, le chemin est tout tracé. Pourquoi les autres n’arrivent pas à comprendre ? C’est si difficile que ça ? Être honnête, simple mais aussi avec un minimum de bon sens ? Cela reste difficile à trouver. Les plus grands s’éteignent de jours en jours. Peut être sont ils usés à force de combattre cette injuste qu’inflige l’ignorance ? Je suis ignorante. Je dois l’admettre. Je ne connais pas le reste des clans, mais je ne juge pas. J’attends de voir ce que la vie me réserve et me laisse guider. Les rencontres arrivent toujours à un moment précis de notre existence. Pourquoi vouloir précipiter les choses alors qu’elles arrivent toujours à bon point ? Etoile du Présage, aujourd’hui, peut être une autre meneuse un autre jour qui sait. Cela fait de nouvelles rencontres, de nouvelles discussions, de nouveaux liens. On ne peut pas refuser une rencontre prévue par le destin parce que les préjugés nous en empêche. Ce ne serait pas malsain d’agir de la sorte ? Nous sommes tous différents dans chacun de nos clans, mais nous sommes tout de même rassembler par cette chaleur familiale qui émane de nos cœurs. Néanmoins, ces flammes s’affaiblissent. Elles ne sont pas immortelles. C’est bien pour cela qu’elles s’éteignent chaque fois un petit peu plus lorsqu’un être aimé de tout notre cœur nous laisse pour rejoindre ses ancêtres avec les clans des Etoiles. Au moins, quelques soient nos erreurs dans notre vie, on sait que l’on peut toujours retrouver ceux qui nous ont quitté en les rejoignant. Est-ce mal de dire que durant certaines périodes, nous souhaitons la mort pour revoir une dernière fois nos êtres les plus chers ? On sait pertinemment qu’ils ne reviendront pas, alors pourquoi ne pas aller les rejoindre ? Jamais, on ne le fera. Pour l’honneur du clan, pour notre honneur personnel.

 

Ma question l’avait surprise. Pourquoi ? Serait ce parce que je suis triste et qu’en parler pourrait raviver ma plaie ? Pas forcément. Enfin, si tu me racontais des choses sur lui qui le mettait en valeur. Du moins, ses qualités. Je ne peux parfois m’empêcher de penser que si tous les chats pouvaient être comme lui, le monde serait parfait. Nul défaut. « Oui, effectivement. C'était un très bon ami à moi. Nous avions grandit ensemble en quelques sortes. » Vraiment ? Une de ses amies proches ? Aurais je pus mieux tomber pour parler d’une personne tel que lui ? Si tu as grandis avec lui, tu devais le connaître mieux qui quiconque. J’aimerais entendre des péripéties de vos aventures, si vous en aviez eus. Des anecdotes, qui me rendrais heureuse de savoir que celui qui m’a presque aidé à vivre était aussi comme les autres, en faisant parfois des bêtises. Je ne sais pas si j’ennuie les autres à toujours reparler du passé, mais il faut avouer que parfois, ça aide à avancer. A continuer de se battre chaque jour. Mais es-tu sûre de n’être qu’une amie ? Tu pourrais être plus, je ne t’en voudrais pas. J’aimerais tellement cerner son entourage, mais maintenant qu’il est parti, ce serait un peu compliqué. « Je vois. Il ne te manque pas parfois ? Je veux dire, souvent le soir en regardant le ciel avant d’aller me coucher dans ma solitude, je repense à lui et à tout ce qu’on a pu vivre. » Je ne sais pas vraiment si parler ainsi rend actif. Enfin, j’ennui mon entourage avec ça. Il serait plus que probable que la meneuse des océans ne rentre chez elle malgré la nuit plutôt que d’écouter mes simagrées. « Je vais arrêter de parler de ça. Je t’ennuie sûrement. » J’offre un sourire calme à la meneuse, je m’excuse sincèrement si j’ai pu l’ennuyer avec ce retour dans notre triste passé.

« Que dire d'une perte si ce n'est qu'elle est douloureuse, que l'on ne pourra jamais revenir en arrière. On fait avec. On ne peut rien y changer. On doit l'accepter et le destin vous y poussera un jour ou l'autre. Il faut vivre comme on l'a toujours fait, bien que quelque chose nous manque. On a beau ignorer si on le retrouvera un jour ou l'autre, on essaie d'oublier. On s'y fait sans vraiment s'y faire. On se dit souvent que si il était là tout serait simple, tout serait mieux. On a l'impression que tous nos soucis se seraient envolés, que la vie serait meilleure, qu'on aurait plus jamais peur si il était à nos côtés. Mais ce n'était que des illusions, de simples illusions. Ce n'étaient que de faux-espoirs qui parfois nous feraient vivre. »

Étoile du Dragon me manquait, je devais l'avouer. Ce meneur, je l'avais toujours admiré, je l'avais toujours respecté et surtout encouragé. Il en avait eu besoin. Perdre sa compagne, sa moitié, son double en quelques sortes, c'était quelque chose que j'avais vécu. C'était quelque chose que j'avais eu du mal à accepter, et pourtant s'était arrivé, ça s'était produit, tout s'était passé. C'était quelque chose que jamais je ne pourrais oublier. Sa perte me peinait fortement. On était pareils en fait. Enfin presque. Nos histoires n'étaient pas si différentes que ça, bien au contraire. Notre destin l'avait voulu, le Clan des Étoiles l'avait prédit. « Je vois. Il ne te manque pas parfois ? Je veux dire, souvent le soir en regardant le ciel avant d’aller me coucher dans ma solitude, je repense à lui et à tout ce qu’on a pu vivre. » C'est vrai qu'il me manquait, beaucoup même. On aurait pu devenir de très bon, encore plus que nous ne l'étions déjà. C'était quelqu'un de bien, de très bien. Mais nous avions des points différents, heureusement. Il était très pacifiste et je n'étais pas vraiment de cet avis, je n'étais pas totalement comme lui. Je trouvais qu'il en faisait trop sur ça, et je lui avais déjà dit. Il était trop gentil, trop généreux, trop bon. Je pense que c'est ça qui faisait que nous n'étions pas aussi proches que nous aurions voulu l'être. Après tout c'était quelqu'un d'assez différents sur les traits de caractères, pas sur l'histoire. 

Je songeais à tout cela en regardant la nouvelle meneuse, Étoile du Requiem. Elle avait une bonne mentalité et elle était consciente du fonctionnement du monde, de la forêt. Elle n'avait pas ce coté complètement pacifiste qu'avait mon ancien ami. Elle avait la conscience, et c'était tout ce qui comptait. Elle ne mènerait pas le Clan des Herbes à sa perte en refusant catégoriquement de se battre. « Je vais arrêter de parler de ça. Je t'ennuie sûrement. » Ce n'était pas du tout le cas, bien au contraire. Pour une fois j'avais une conversation intéressante avec quelqu'un que j'allais commencer à apprécier. Comme quoi une perte pouvait rapprocher. Un chagrin pouvait permettre d'aimer. Une peine pouvait pousser à sociabiliser. « Pas du tout. On ne peut rien y changer, c'est la triste vérité. Je pense que nous devons faire avec et l'accepter. Il faut savoir tourner la page comme on dit, avec plus ou moins de facilité. Pour ma part j'ai encore du mal à aller de l'avant. J'ai même failli fermer le livre.. » J'entendais par là tous les quitter, tous les abandonner pour aller le rejoindre. Mais je les ai bien regardé, je les ai tous dévisagé, un à un. Ce que j'en ai tiré ? Qu'ils avaient encore besoin de moi. Que j'allais devoir rester là. Je devrais continuer à les supporter, à les aider. J'étais née pour ça, non ? C'était ma destinée, tout ce que le Clan des Étoiles avait tracé. Il faut bien que j'accomplisse ça si je veux ensuite reposer en paix. Il faisait de plus en plus sombre. La nuit n'allait pas tarder. Mais je ne comptais plus le temps. Je m'en fichais même totalement.