Lors de mon réveil, ce matin-là, ma seule envie était de bouger. Après une longue nuit de sommeil, j'ai toujours envie de sauter partout et de courir dans tout le camp pour me dégourdir les pattes et pour remettre en marche mon petit cerveau. Bien sûr, c'était impossible pour moi de faire cela sans réveiller toute la compagnie. Je décidais donc de sortir discrètement du camp et de ne pas attirer l'attention, profitant du fait que le camp soit encore endormi pour partir incognito. Une fois hors de vue, je m'assis pour réfléchir à ma destination. Je ne savais pas trop vers où me diriger comme je ne connaissais pas tout le territoire. Je humais l'air pour assimiler l'odeur de mon camp mais ce fut une toute autre effluve qui me parvint. Celle d'une proie. Un rongeur plus précisément. Je m’aplatis au sol et me dirigeai vers l'origine de l'odeur. Après quelques secondes de traque, j’aperçus enfin le petit animal. C'était un campagnol. Il fallait que je l'attrape ce campagnol... Mais je n'avais que très peu de chance. Mon entrainement n'avait pas commencé comme j'étais toujours un chaton. Ne connaissant rien des positions, je me lançais pas très habilement sur le rongeur, tout en faisant un boucan d'enfer. Ma proie détala sans demander son reste. N'importe qui aurait abandonné. Mais moi, je m'élançais à la suite de la petite bête, saisissant cette chance pour me défouler.

Je courus un bon quart d'heure, voire plus. Je réussis à ne pas me laisser distancer par le rongeur, profitant de ma petite taille pour me faufiler partout. Pour terminer cette poursuite, le campagnol fonça dans un trou d'où il ne ressortit jamais. J'eus beau grogner, feuler et creuser, il resta terré dans sa cachette. Après avoir réalisé que je n'avais plus aucune chance d'attraper cette proie, je décidais d'observer les alentours. J’étais dans une petite clairière, séparée en deux par les vestiges d’un chêne. Le grand arbre était couché sur le sol, et paraissait très ancien. Son écorce était tombée, ses racines s’étaient décrochées. Le chêne avait sûrement été foudroyé lors d’une tempête ou d’un orage qui avait eu lieu bien longtemps avant ma naissance. Je respirais à nouveau l’air de la forêt. Ici, l’air était plus humide, plus frais. L’odeur boisée de mon Clan était toujours présente, mais commençais à se mêler à une autre. Je ne devais pas être loin d’une frontière, sûrement celle avec le Clan des Océans. Ou sinon… L’odeur de ce Clan était peut-être si présente car un de ses membres était dans les alentours ? J’entendis alors des bruits de pas, ainsi qu’une respiration. Mon cœur se mit à battre plus rapidement. « Il y a quelqu’un ? » demandais-je au vent, brisant le silence qui me terrifiait. Oui, quelqu’un était là. Je le savais.

Une petite chatte quitta les fourrés et pénétra dans la clairière. Elle était plutôt jolie, avec sa fourrure brune rayée et ses grands yeux bleus. Elle ne laissait paraitre aucune peur et avait l’air sûre d’elle. Elle répondit à ma question d’une voix désinvolte : « Il y a moi. » La chatonne en face de moi devait avoir mon âge, car nous étions de taille égale. Son odeur était bien celle du Clan des Océans, comme celle de Petite Rosée. Savait-elle qu’elle avait quitté son territoire ? Si elle en était consciente, elle aurait pu montrer un peu plus de crainte. Face à un guerrier, elle aurait sûrement moins fait la maligne, mais c’est sûr qu’un chaton comme moi ne pouvait pas vraiment inquiéter. De plus, je n’avais pas l’intention de l’attaquer ou de l’obliger à quitter notre territoire. J’avais du mal à comprendre ces limites claniques, à les respecter et à les faire respecter. Mes responsabilités d’apprenti, puis de guerrier, viendraient assez vite. Trop vite. Je voulais essayer de profiter de chaque rencontre et de ma prétendue innocence de chaton avant d’avoir des obligations qui restreindraient ma liberté. Qui gâcheraient ma vie et qui m’empêcheraient d’en profiter à fond.

« Comment t’appelles-tu ? » miaulais-je gentiment. Je m’étais assis près du vieux chêne foudroyé, sans quitter des yeux la chatonne. Cette-dernière avait l’air légèrement désintéressée de la scène. Mes pensées m’avaient aussi déconcentré, mais mes paroles me firent revenir à l’instant présent. Je fixais la petite femelle avec insistance, je la dévisageais des pattes à la tête, essayant de déceler ses pensées et ses émotions. Son visage était de marbre, tandis que le mien affichait une mine réjouie, mais une lueur interrogative brillait dans mon regard. On me disait parfois plus mature que les autres chatons de mon âge, même si j’évitais de le montrer. Il me semblait, à cet instant, et sans vraiment la connaître, que la chatonne des Océans était comme moi. Je lui souris, essayant de la mettre à l’aise. Puis j'attendis sa réponse.

« ... Petite Poésie. Et toi ? Tu es d'ici, du Clan des Éclairs ? » déclara la jeune chatte, après m’avoir dévisagé à son tour. Elle ne montrait pas vraiment de méfiance, même si elle paraissait hésitante à se confier, à donner son identité. D’après ses paroles, Petite Poésie savait donc où elle se trouvait. Elle était parfaitement consciente qu’elle était en territoire ennemi, et savait même lequel. Certains chatons de notre âge ne connaissaient pas encore toutes les odeurs des Clans, mais la chatonne des Océans avait l’air d’être calée sur le sujet. Moi aussi, d’ailleurs. Mes innombrables escapades m’avaient menées jusqu’aux frontières des territoires, voire plus loin, chez l’ennemi. Cela me permettait de pouvoir reconnaître les odeurs facilement. Je n’en étais pas fier pour autant. J’évitais de me vanter. Je préférais me faire remarquer autrement qu’en me pavanant. J’avais même plutôt l’habitude d’être hostile envers moi-même, de me détester, de me maudire pour mes bêtises. Je n’étais pas un chaton narcissique, loin de là. Mon regard revint sur Petite Poésie, qui se tenait toujours en face de moi, attendant mes paroles.  
« Je m’appelle Petit Mirage. » répondis-je avec entrain. Au final, un nom ne signifiait pas grand-chose, mais j’aimais le mien. Je ne connaissais même pas réellement sa signification, et n’avais jamais osé demander à ma mère pourquoi elle m’avait appelé ainsi. Petit Mirage… Ça sonne bien, non ? Petite Poésie c’est joli aussi. Mais au final, ça ne sert qu’à nous définir, à nous différencier les uns des autres, autrement que par l’apparence physique. Les noms, dans les Clans, ça sert à montrer notre grade, notre âge. Quand on grandit, on en change, quand on devient chef aussi. C’est bizarre de ne pas garder exactement le même nom toute sa vie, ça fait comme si on changeait d’identité, qu’on n’était plus le même chat… J’avais tendance à réfléchir pour rien. Mes pensées revinrent à l’instant présent, à ma rencontre avec la chatonne au si joli nom. Je m’assis, avant de poursuivre d’une voix enjouée: « Oui, je suis un chaton du Clan des Éclairs. Toi, tu viens du Clan des Océans, non ? »

Je crus voir à son expression que mon nom ne la laissait pas indifférente. Elle devait le trouver beau, elle aussi. La petite femelle réfléchit quelques instants, avant de me répondre. « Oui, je suis du Clan des Océans. Pardon d'avoir franchi la frontière, je ne m'en étais pas aperçue. » s’excusa-t-elle. Il me semblait que le Clan des Océans n’était pas vraiment proche du Clan des Éclairs, et que leurs liens n’étaient pas très amicaux, sans pour autant qu’ils soient en conflit. De toute façon, je ne prenais pas en compte les alliances claniques pour choisir mes amis et mes ennemis. Je n’avais pas encore conscience de la puissance des différences qui séparaient les Clans, et je m’en fichais. Tous les jeunes félins de la forêt n’étaient pour moi que des chatons semblables, avec qui il est possible de nouer des liens. Petite Poésie ne devrait pas être là, et alors ? Elle était pourtant dans cette clairière, avec moi, alors autant en profiter pour faire connaissance !
Je souris à la chatonne des Océans, avant de répliquer : « Ne t’inquiète pas, c’est pas grave. Ça arrive à tout le monde. » Je n’étais pas le dernier à qui ça arrivait, d’ailleurs. Seule différence, mes sorties étaient toutes volontaires. Et, à chaque escapade, je me rendais bien compte que j’avais quitté mes territoires. J’aurais été bien sot et égoïste si j’avais blâmé Petite Poésie, ou si je lui avais fait des reproches. Bien sûr, ce n’était pas mon caractère, je préférais la réconforter. Elle n’était pas à l’abri de toute réprimande, alors autant que je n’en rajoute pas une couche. Sa sortie ne passerait sûrement pas inaperçue pour son Clan, et il vaudrait mieux qu’elle ne s’attarde pas dans les alentours si elle ne voulait pas subir les foudres du mien. Si nous étions retrouvés ensemble par un guerrier des Éclairs, à discuter gentiment, sans que j’essaie de la chasser de nos terres, Petite Poésie ne serait pas la seule à être sanctionnée. « Mais tu as de la chance de ne pas être tombée sur un guerrier, même si ceux de mon Clan ne sont pas agressifs et malveillants. » ajoutais-je à moitié pour moi-même, pour me rassurer. Après tout, je n’avais jamais eu peur d’être puni, ce que je supporterais sans problème. Je pourrais me consoler avec tous les beaux moments que j’avais passés, et les jolies rencontres que j’avais faites. Ma vie de chaton était beaucoup plus joyeuse et active que celle des autres jeunes. J’en étais sûr.              

On m’aurait dit, si l’on m’avait vu, que ce que je faisais était mal. Je m’en fiche totalement. Pour moi, une action, une parole, une attitude, cela ne peut être ni bien, ni mal. Pour d’autres, si tu respectes les règles, si tu obéis, c’est bien. Mais si tu violes les limites, si tu triches ou si tu mens, c’est mal. Tout n’est qu’une question de perception, finalement. C’est comme si l’on dit que je suis un chaton anormal. C’est faux, ou en tout cas c’est une déclaration injuste. Quand on a depuis toujours vécu dans un environnement particulier, avec des coutumes spécifiques, on se considère comme normal, car c’est ce que l’on connait. Tout le reste est différent, mais pas anormal. Voyez-vous, comme je suis philosophe aujourd’hui…
Mes sages théories furent dispersées, lorsque Petite Poésie reprit la parole, après un court moment de réflexion. « Merci. Tu m'as l'air d'être quelqu'un de bien. Je suis contente d'être tombée sur toi plutôt que sur un guerrier. » Sa déclaration me fit esquisser un sourire. Je pouvais employer exactement les mêmes mots qu’elle, dans notre situation. Si j’étais moi-même tombé sur un guerrier ou un membre du Clan, il aurait pu me dénoncer. Petite Poésie, elle n’oserait pas le faire. Nous étions en quelques sortes liés par un pacte silencieux, qui nous empêchait l’un l’autre de raconter cette escapade. Mais, au-delà des promesses, ce secret serait gardé par la confiance réciproque qui commençait à grandir entre nous. « Je constate que je ne suis pas la seule qui fuit la pouponnière. » ajouta la chatonne dans un sourire complice. Je lui adressais un regard malicieux. Cela nous faisait un point commun de taille. Je lisais sur le visage de Petite Poésie sa fascination pour le monde extérieur, et son ennui lorsqu’elle restait sans rien faire, dans un endroit connu par cœur. Six lunes passées à la pouponnière serait un supplice pour moi, c’est pourquoi j’ai commencé à m’échapper dès que j’ai appris à marcher. Tout était trop éphémère pour gâcher une partie de sa vie à ne rien faire. Notre jeunesse aussi, était éphémère. Mais la mort, elle, serait infinie. Et sans possibilité de revenir parmi les vivants. Mon cœur se serra à cette pensée. J’avais peur. Peur de mourir, un jour. Peur de voir ceux que j’aime mourir autour de moi. Peur d’avoir des regrets. Peur qu’il soit trop tard. Même si cela me faisait du mal, je ne devais pas fuir, je ne devais pas éviter de réfléchir à ce sujet. Mais je n’osais en parler à personne, et cela me mettait de plus en plus mal à l’aise.  
« Je crois que ça vaut mieux pour moi aussi de ne pas avoir croisé un guerrier, même s’il fait partie de mon Clan ! Mais bon, ce n’est pas la première fois que je quitte le camp, et quelque chose me dit que toi non plus... » déclarais-je, rompant le silence songeur qui s’était installé. Mon regard passa à nouveau sur la chatonne des Océans, l’examinant des pattes à la tête. Elle était un peu plus petite que moi, sûrement plus jeune, mais toute aussi mature ! Certains apprentis de mon Clan n’étaient que des idiots prétentieux et gloutons, avec qui il est impossible d’avoir une conversation. Un sourire passa sur mon visage. Après m’être donné un coup de langue sur l’épaule, je demandais : « Est-ce que tu as hâte de devenir apprentie ? » Elle avait beau être légèrement plus petite que moi, son tour viendrait dans peu de temps. Le mien aussi. Je craignais ce moment. Une autre chose dont j’avais peur…

Je parvins à arracher un sourire à la chatonne. « Je me ferai punir si quelqu'un me dénonçait, comme toi sans doute. Mais je préfère ça à la pouponnière. » dit-elle, d’un ton ironique et joyeux. Petite Poésie se détendait, elle était plus calme, plus détendue minute après minute. J’arrivais à la mettre en confiance, à lui prouver que je n’étais pas dangereux pour elle, qu’elle pouvait se confier, se libérer. Le regard de la petite femelle monta vers le ciel dégagé. Le soleil avait été voilé un instant, un oiseau passant sur le chemin de ses rayons dorés. C’était un rapace, un prédateur. On m’avait dit qu’ils étaient dangereux, mais je n’avais pas peur. Je ne surpris aucune crainte non plus dans les yeux de ma nouvelle amie. Elle oublia bien vite l’oiseau, se replongeant dans la discussion, tandis que celui-ci partait vers d’autres cieux. J’aurais tant aimé pouvoir voler… Admirer les beautés du monde de si haut, sentir l’air et la puissance du vent dans mes plumes, défier la force des éléments, ou au contraire, ne faire qu’un avec le blizzard. C’était ça la liberté. La vraie.
Songeuse, comme moi, Petite Poésie répondit à ma question : « Oui, j'aimerai bien... Mais je suis attachée à mon nom, d'un autre côté. Et à ma vie de maintenant. Ça me manquera, quand mes sorties ne seront plus réprimandables. » Un point commun de plus. Aux premiers abords, je n’aurais pas pensé être à ce point semblable à Petite Poésie. Je me retrouvais en elle, je savais qu’elle pouvait me comprendre, sans me juger. De Petit à Nuage. Un grand pas, le premier changement important dans la vie d’un chat de Clan. Tout basculait. Tout était modifié. Dans environ une lune, nous quitterons nos vies peinardes, pour de nouvelles responsabilités. Un guerrier de nos Clans respectifs prendrait chacun de nous sous son aile. Mais je ne voulais pas ça. Je voulais rester libre. Indépendant.
A mon tour, je donnais mon point de vue. Je savais que je pouvais confier mes craintes à Petite Poésie, et que même si elle ne les partageait pas, cela ne changerait pas son avis sur moi. « Petite Poésie… J’ai peur. J’ai peur de changer, de devenir différent de ce que je suis maintenant. J’ai peur d’être quelqu’un d’autre, quelqu’un qui ne me ressemble pas. » Quelques secondes plus tôt, un sourire rayonnant éclairait mon visage, mais il disparut bien vite. Mes inquiétudes enflammaient mes yeux de désespoir. Ma sincérité était désarmante. J’avais réellement cette peur qui me tiraillait, qui hantait mes rêves. Je ne voulais pas devenir un guerrier. Je ne voulais pas devoir me battre, même pour le Clan qui m’avait élevé. Je ne voulais pas de sang, pas de morts, pas de douleur. Je ne voulais pas être jugé sur mes capacités en chasse, ou en combat. Je ne voulais pas haïr les autres Clans, uniquement car ils ne s’appelaient pas Clan des Éclairs. Je ne voulais pas devenir un monstre. « Je n’ai jamais parlé de ça à personne. Je fais comme si j’étais invincible, comme si j’étais toujours le plus heureux. Je préfère cacher mes doutes, mes différences. Je préfère faire comme si je n’avais pas peur de.. mourir. » Ma voix vacilla sur le dernier mot. Faiblit. S’éteignit. J’attendis le verdict de Poésie.

Son regard calme et impassible me perturbait. Elle ne laissait presque rien paraître. Ni surprise. Ni désaccord. Ni dégoût. Ni rien d’autre. La chatonne fit quelques pas et me donna un petit coup de tête affectueux, tout en déclarant : « Tu n'es pas le seul, tu sais. Je crois qu'on a tous peur de mourir et de changer, mais... » Sa sérénité m’apaisait. La boule dans mon ventre et dans ma gorge se desserra. Les larmes qui tentaient de s’échapper du coin de mes yeux n’y parvinrent pas. Je respirais longuement, évacuant les sentiments oppressants qui me bousculaient. Seuls ses mots se gravant à l’encre indélébile dans mon cœur comptaient. Elle finit sa phrase : « Certaines choses sont obligées de changer. Regarde autour de toi. Cet arbre. Il va perdre ses feuilles, il va reverdir, ainsi de suite jusqu'à ce qu'il finisse par mourir. Mais s'il était toujours vert ou toujours sans feuille, alors on se dirait qu'il est anormal, différent, tu me suis ? » Oui. Je la suivais. Je répondis d’un hochement de tête, la laissant poursuivre. Mon regard avait suivi le sien, se fixant sur l’arbre qu’elle avait pris comme exemple. Il était immense, droit, si puissant. Si inébranlable. Je n’étais qu’une poussière comparé à lui. Et pourtant. Nous étions deux êtres, vivants au même rythme, partageant les mêmes terres. Nous étions tous deux destinés au même sort. Ainsi allait la vie. Ainsi suivait la mort. Ce qui nous différenciait, c’était ce qu’on décidait d’en faire. Ma camarade poursuivit : « Toi et moi, comme tous les autres, sommes destinés à changer. Mais l'important, c'est de toujours être soi. Tu me dis que tu te fais passer pour invincible, pour heureux... Tu ne dois pas faire ça. Tu dois vivre comme tu l'entends. Tu dois accepter de commettre des erreurs, d'être faillible... Et comme ça, tu sauras qui est le vrai Petit Mirage, et tu n'auras plus peur du changement. » Poésie se tut, laissant ses mots s’imprégner dans mon esprit. Je prenais conscience de leur sens, de la vérité et de l’importance de ses paroles. Chacun est unique. Je suis comme je suis. Je n’ai pas à vouloir être quelqu’un d’autre que moi. Je n’ai pas à renier mon caractère, ma personne. Je dois l’accepter. M’accepter. J’étais heureux de comprendre enfin. Certains passent leur vie dans l’ignorance, une vie de mensonges et de douleur. Je n’en ferais pas partie. « Et puis, pour moi, tu seras toujours Petit Mirage. » Bien sûr. J’étais Petit Mirage. Et même bien plus que ça.
Je plongeais mes yeux vairons dans ceux de Petite Poésie, bleus comme l’océan. Qu’est-ce donc l’océan, d’ailleurs ? Je ne l’ai jamais vu, je sais juste que c’est de l’eau, comme celle de la rivière où je vais boire. Non, les yeux de Petite Poésie sont bleus comme le ciel. Un ciel jamais voilé par aucun nuage. Un ciel infini, profond et sage. Alors, si la chatonne des Océans est le ciel, je serais le vent. Nous vivrons ensemble pour l’éternité, nous bercerons des milliers de générations après nous. Tant que l’un sera en vie, l’autre pourra vivre aussi. Mais si l’un disparait, l’autre sera perdu, incapable de continuer. Si elle m’oubliait, je mourrais. Bien sûr, c’était faux. Ce n’était qu’un rêve. Bref, je m’éloigne. Détournant les yeux du regard de Petite Poésie, je murmurais : « Merci, Petite Poésie. Tu as raison. Je n’avais jamais vu le monde sous cet angle. Je n’avais jamais pensé comme ça. Tu m’as ouvert les yeux. Je ne peux pas te promettre de ne plus avoir peur, mais je sais maintenant que je persévérais toujours. Comme ça, je ne regretterais rien quand le Clan des Étoiles m’appellera. » Je marquais une pause. Mon sourire était revenu, illuminant mon visage crème, comme s’il ne l’avait jamais quitté. Je me sentais heureux, je me sentais grandi. « Je viens de comprendre une chose essentielle. Je suis ce que je suis : Petit Mirage. Mais d’autres m’aident à me construire, sans pour autant me modifier. Petite Poésie, tu fais partie de moi, je crois. Tu es une pièce du puzzle qui me constitue, et qui s’agrandit chaque jour. On change tous, et pas seulement par l’âge. »

Je déplace, merci pour ce RP il était génial.