Il y avait bien quelqu'un. L'odeur à la fois si étrangère et si familière du clan des Océans emplit mes narines. Je me retournai brusquement, sur le qui-vive, prêt à agir, persuadé que mon regard tomberait immédiatement sur quelqu'un. Mais, surprise, il n'y avait personne derrière moi. Seule les serviteurs de la nature, arbres, buissons et fleurs semblaient m'observer. Je plissais les yeux, regardant avec attention, à la recherche d'un bout de pelage, d'un regard perçant, de n'importe quoi en fait pouvant trahir la présence de l'inconnu. Ce n'était pas la meneuse, elle serait venue directement à ma rencontre. Pourquoi se cacher d'ailleurs ? Je ne savais pas trop si je devais être inquiet ou plutôt rassuré. Il y avait deux possibilités : la première, c'était qu'un guerrier se tenait près de moi, tapis dans l'ombre, prêt à bondir et à me faire la peau d'une seconde à l'autre. La seconde, c'était que l'autre félin avait pris peur en me voyant. J'attendis quelques secondes, tout en restant calme, en essayant de faire le clair dans mes idées. Il n'y avait pas un bruit, pas un mouvement, au fond, c'était comme si j'étais seul. Devant cette absence de réaction, je finis par me convaincre qu'il n'y avait pas de danger immédiat.


A pas lents et feutrés, je me mis à chercher l'autre chat. Il ne me fallut que quelques mètres pour apercevoir un pelage crème au milieu des herbes vertes. Je me levais et m'approchai. C'était sûrement une apprentie, elle n'était pas assez petite pour toujours vivre à la pouponnière. Son museau, ses pattes et ses oreilles contrastaient avec le reste de son corps par leur couleur brune. Elle avait de très jolis yeux bleus, hypnotisant et fascinants, un peu comme ceux d’Étoile du Présage. Ne voulant pas l'effrayer, je m'assis et enroulai ma queue autour de mes pattes. J'avais eu tort de me méfier quelques minutes auparavant, mais comment aurais je pu me douter ? Avec les conflits entre les clans, les désaccords entre chef, les relations inter-claniques se détérioraient petit à petit et il était vrai que, parfois, je ne me sentais pas protégé d'une attaque quelconque. J'ignorai parfaitement comment mon clan et moi même étions vu par les autres guerriers. Peut être que de fausses rumeurs circulaient à notre sujet ? Que les autres nous voyaient comme des ennemis ? Je ne pouvais pas le savoir. La seule et unique chose qui était clair pour moi et que j'étais incapable de faire du mal à quelqu'un d'innocent, qui n'a pas touché aux miens. J'espérais juste que cette petite en face de moi ne me verrais pas comme une menace, car ce n'était pas ce que j'étais.


Pour prouver ma bonne foi, je lui souris et engageai la conversation.


« Bonjour jeune fille. Qu'est ce qui t'amène par ici ? »

J'avais parlé avec douceur et gentillesse, comme je le faisais pour chaque chaton inconnu. Avec les adultes, c'était différent. Surtout ceux qui avaient des postes importants. Je préférais rester neutre avec eux, ne pas montrer ce que je ressentais. Cependant, c'était plus facile à dire. Mon bon fond finissait toujours par prendre le dessus.